Liste
- Alain Chaufour
   Animateur Récré A2
- Annabelle Roux
   Alex dans Cat's Eye, Georgie
- Corbier
   Récré A2 - Club Dorothée
- Donald Reignoux
   Shinji dans Evangelion
- Eric Legrand
   Seyar (CDZ), Végéta (DBZ)
- Marie Dauphin
   Animatrice Récré A2
- Mathias Kozlowski
   Olivier dans Olive et Tom
- Michel Elias
   Pumbaa, Teletactica, Zeltron
- Pascale Jacquemont
   Wattoo-Wattoo, Super Nanas
- Philippe Ogouz
   Ken, Capitaine Flam, Edgar...
- Thierry Bourdon
   Ramis (Albator 78), Théo
- Thierry Ragueneau
   Matt Tracker, Marsupilami
Interview Michel Elias
Michel Elias fait partie de ces comédiens "touche-à-tout", dont la voix et le jeu ont rendu célèbres personnages, séries ou spots télévisés (entre autres...) Les pubs "La Pie qui chante", "Michoko", "Wario", "Ovomaltine", "Vahiné c'est gonflé"... c'est lui ! C'est avec une immense gentillesse et une très grande disponibilité qu'il m'accorde une interview par téléphone, pour la compléter par mail...

Planète Jeunesse : Monsieur Elias bonjour !

Michel Elias : Bonsoir, votre site est très sympa ! ;°))

P.J. : Commençons par une question un peu classique : Qu'est-ce qui vous a donné envie de faire ce métier et comment y êtes vous venu ?

M.E. : J'ai "toujours" eu envie de faire ce métier ... J'avais, très tôt disons, ce que l'on appelle de "bonnes dispositions"; un certain talent expressif, gestuel et vocal ...( qui parfois débordait aussi sur les bancs de "la communale" ou du lycée)... En vacances, je jouais des sketches, j'étais heureux de changer de voix, de personnalité, en endossant différents rôles, en racontant des histoires; c'était captivant de captiver un public, d'attirer l'attention sur soi, certes, mais aussi d'inventer des mondes, de faire partager des émotions, des rires ... J'ai "forcément" rencontré des gens intéressés par ma personnalité, et de fil en aiguille, je suis arrivé à jouer dans des spectacles de plus en plus professionnels... jusqu'à la rencontre avec Jean-Michel Ribes en 1970 (tiens , déjà ?) pour "Les Fraises Musclées", avec - entre autres- Philippe Khorsand, Andréa Ferreol, Philippe Brizard, Jacques Cancelier ... plus de 300 représentations ...

P.J. : Vous avez un parcours artistique assez étendu : doublage de publicités, de dessins animés, théatre, télévision... Dans quelle partie de votre discipline de comédien êtes vous le plus heureux et prenez-vous le plus de plaisir ?

M.E. : Ben ... ahem ... que voulez-vous que j'vous dise, moi ? ÇA DÉPEND ! :))
ça dépend des moments, des rôles, du texte, du metteur en scène, de l'habilleuse, du café chaud ou pas assez, etc ... etc ... etc ... ;°)) Enfin disons pour faire hyper court, que je préfère la scène et le rapport direct avec le public ...cet échange là est incomparable !

P.J. : Sur votre site, on apprend qu'en 1995, vous avez mis en scêne un spectacle avec des artistes sourds. Pouvez-vous nous parler un peu de cette expérience ?

M.E. : C’est un immense souvenir, plein d’émotions. J’étais allé voir le spectacle d’Emanuelle Laborit “les Enfants du Silence”, qui m’a profondément bouleversé. Je suis allé la rencontrer dans sa loge et bien entendu, évidemment du fait qu’elle soit sourde, je ne représentais rien du tout pour elle puisqu’elle n’a jamais pu entendre ma voix... et ne savait donc pas quelle pouvait être ma notoriété en la matière ; Une rencontre vraiment poignante et très forte. Et dans ce spectacle, il y avait deux comédiens sourds, Joël CHALUDE et Fanny DRUILHE, qui perdaient leurs repères au bout d’un certain nombre de représentations. Ils s'en sont ouvert à moi, et devant leur désarroi, je leur ai proposé de les faire travailler, "en coaching" ... Alors, je les ai fait travailler sur le sens du texte... sur l'articulation et la résonance du verbe dans l'espace. Je leur faisait toucher mon larynx ... presque un travail d’orthophoniste :)) ... et par la vibration physique j'arrivais à mieux faire comprendre et faire passer à la fois l'expression technique et artistique ; Peu à peu, ils se sont remis à nourrir le jeu de leurs personnages ; c’était certes fastidieux, mais ils ont repris confiance. Ma plus belle récompense fut lorsqu'ils sont sortis du théâtre et mon appelé au téléphone (!) (Oui, Fanny et Joël sont tous deux appareillés; Fanny entend mieux que Joël, mais c'est Joël qui parle (oh que oui!) et pour une conversation téléphonique, elle lui "traduit" ce que je dis )....
Toujours est-il qu'ils me disaient qu'ils avaient retrouvé sur scène le sens de leur spectacle, qu'ils en étaient formidablement heureux, et qu'ils me remerciaient encore et encore ... et moi, à l'autre bout du fil, je sanglotais comme un môme ... Je me souviendrai toute ma vie de cette émotion là ... Par la suite, Joël m’a demandé de mettre en scène un spectacle en duo, écrit avec un autre sourd, Marc Delacour, ... "One man show à deux" - c'est le titre- Joël est un mime assez remarquable, mâtiné de Chaplin et de Keaton ... et Marc est d'abord un merveilleux danseur, (expert-comptable) très expressif, qui pratique et enseigne la danse de salon ... spectacle muet, destiné et à un public des sourds et d'entendants, très visuel, avec beaucoup de musiques ... musiques qui devaient résonner très fort, pour que les artistes en ressentent toutes les vibrations et puissent appuyer dessus leur jeu ... Expérience très forte, traversée de moments difficiles, dans l'échange et la (in)compréhension ... magnifique !

P.J. : Pour toute une génération qui a grandi avec la télé, votre voix est très connue pour des publicités devenues cultes comme la barre Ovomaltine, mais surtout celles de la Pie qui chante : "Petit Pimouss" ou "Michoko"... Quel souvenir gardez vous de ces spots et comment trouvez-vous quelle voix sera appropriée à tel personnage ? Par exemple, comment vous est venue la voix de la Pie qui chante ?

M.E. : Encore une fois TRÈS DIFFICILE de répondre ...(enfin j'veux dire qu'en conversation libre, micro ouvert, ça va :), mais vous répondre sur mon clavier, me pétrifie quelque peu, gomme mon jaillissement spontané légendaire (ahum...) tout ça quoi ...) Bon, d'abord, Ovomaltine est une pub à l'image, dans laquelle je joue physiquement ... Là, y'a pas qu'la voix, j'veux dire ... j'ai eu la chance de tourner dans cette pub au concept génial et qui restera dans les annales de la création publicitaire ...
L'excellent souvenir que je garde de "La Pie qui Chante", c'est d'abord la rencontre avec le réalisateur Gérard Krawczyk, extrêmement talentueux, intelligent, sympa-drôle-hyper-pointu-pro, qui nous a aussi fait quelques jolis longs métrages de cinéma comme : Je hais les acteurs / L'Eté en pente douce / Héroïnes / Taxi 2 (dans lequel il m'offre d'ailleurs un p'tit rôle sympa qui ouvre le film) / Wasabi / Taxi 3 / Fanfan la Tulipe ... voyez ? L'excellent souvenir, c'est également la rencontre avec Jacques Hénocq un grand Monsieur de la Création Publicitaire ! et le plaisir de travailler aussi sur des marionnettes d'Alain Duverne , le génie-créateur de toutes les marionnettes des Guignols de l'Info de Canal + . Alors la voix, oui ... La voix me vient ... enfin .... c'est comme dans le travail de masque, dans la Comedia dell'Arte... Je me concentre sur la physionomie du personnage ... La voix prend vie en moi; elle prend place dans mon larynx, des sons me viennent, se transforment, mon gosier se tortille, circonvolutionne, ça sort, j'explose ! Je deviens, La Pie ! (mais faut k'sa plaise, hein, au client, hein )! C'est la même démarche, lorsque je trouve la voix pour "Vahiné ? c'est gonflé !", ou la voix du cochon "Dédé", pour la Française des jeux ...

P.J. : Venons-en au doublage de dessins animés. Vous avez participé au très populaire film "les maîtres du temps", scénarisé par Moebius, où vous prêtiez votre voix au personnage de Silbad. Quel souvenir gardez-vous de ce film ?

M.E. : J’avoue en avoir un souvenir plutôt flou, en fait. Vous savez, il m’arrive (encore il y a peu) de rencontrer des djeun's qui apprennent que j'interprète la voix d'un personnage dans une série qu’ils apprécient et ils me posent plein d'questions sur des épisodes vus la veille... que moi j'ai doublé il y a plusieurs mois, voire plus, ... et je suis bien incapable de répondre à leurs attentes ... je ne suis, bien sûr, pas immédiatement "raccord" avec ce qu'ils ont tout frais à l'esprit , je n'sais pas moi, la suite d'une réplique, un bon mot ou un gag ... Tout ça pour dire que si j’en garde un bon souvenir, j’aurais du mal à vous parler en détail de ce film que j’ai doublé il y a maintenant fort longtemps. Essayons tout de même ... Depuis mon adolescence, j'avais déjà un certain goût pour les bd, la littérature fantastique, la science fiction, Bradbury, Assimov, Lovecraft, Arthur C. Clarke ... je connaissais pas mal l'oeuvre de Topor, ses écrits et ses dessins et illustrations, ses collaborations à la revue Planète, partagées avec d'autres "Grands" du genre... J'avais adoré "La Planète Sauvage" que j'attribuais presque entièrement à Topor étant donné la force de son trait, mais sans pourtant ignorer la réalisation de Réné Lalou ... Et puis un beau jour, Dominique Boischot qui travaillait dans le domaine de la Post-Production Publicitaire {la finalisation technique des films -son et image- depuis la fin du tournage jusqu'à leur diffusion} m'a sollicité et casté pour ce film sur lequel il travaillait pour le compte du producteur Michel Gillet.Je n’ai hélas jamais rencontré Moebius; j'avais déjà lu sa signature à plusieurs reprises dans "Hara-Kiri" ; j'admirais Jean Giraud, Gir, j'avais lu dans Pilote des épisodes de Blueberry .... J'aurais vraiment aimer le rencontrer ! En tous cas, je sais que j’ai pris du plaisir à travailler sur ce film, jouer le rôle de Silbad, le vieux matelot de l'espace ... je sais que j'étais émotionnellement touché par ce personnage qui était à la fois lui-même, Silbad et l'enfant Piel sauvé 60 ans plus tôt ... je trouvais ce paradoxe temporel, le vieil homme et l'enfant ne faisant qu'un, formidablement poétique C’était d'ailleurs très plaisant de vieillir ma voix pour ce rôle ... J'ai toujours aimé ça ... et ça m'est souvent arrivé d'avoir à jouer ou interpréter des rôles plus âgés ... Tenez, j’ai un grand souvenir de “la Flute à 6 schtroumpfs”, ou je doublais le grand Schtroumpf, avant l’interprétation de Gérard Hernandez pour la série basée sur ces personnages. Peyo était un homme adorable qui laissait une grande liberté d’action, il était très ouvert.

P.J. : Vous avez participé à des programmes jeunesse cultes des années 80 qui se voulaient éducatifs et qui étaient sponsorisés par EDF en 1979, et par GDF en 1982, je veux parler de Zeltron (ou vous étiez le héros, une ampoule, un personnage pionnier dans l'image de synthèse) et de Méthanie (la petite flamme bleue). Comment êtes vous arrivé sur ces doublages ? Il ne figure pas de trace de ces séries sur votre site, les aviez-vous oubliées ? ^_^

M.E. : J’avais en effet un peu oublié que j’avais fait ces séries ! En fait j’avais été repéré par Albert Champeaux et son fils Olivier, des Films A.Champeaux, une maison de production à l'esprit très "familial", spécialisée dans les films d'animation; (Albert Champeaux est le papa de "Jean Mineur" vous savez, le p'tit personnage qui ouvre les écrans-pub au cinéma avec son p'tit piolet, avec là aussi la célèbre musique qui fait : tada tada tadadadaa ... tada tada tadadadaa ... hein ? bon ... La pub m'avait naturellement mis en contact avec eux; ils travaillaient aussi sur des films de pub, je faisais des tas de voix différentes, j'étais dans la mouvance, les créatifs de pub me demandaient comme interprète... c'était une très bonne rencontre ! Et c'est tout logiquement qu’ils ont fait appel à mes services pour Zeltron. Les Films Champeaux fourmillaient de belles idées, travaillant formidablement ingénieusement ! A y repenser, que ce soit Zeltron, Télétactica ou Méthanie, les concepts étaient originaux et très agréables. C'est d'ailleurs avec les Champeaux, que j'ai commencé à travailler avec les marionnettes d'Alain Duverne, bien avant la grande aventure des Guignols de Canal + ...

P.J. : Toujours dans le domaine des programmes jeunesse, vous réalisiez en 1982 un tour de force pour le feuilleton Télétactica, ou vous doubliez presque tous les personnages. N'est-ce pas un exercice justement difficile de devoir ainsi "jongler" avec sa voix sur un même épisode pour interpréter des personnages très différents ?

M.E. : Télétactica est un grand souvenir oui, car il y a justement un “exercice” que j’adore : d’une ligne à l’autre changer radicalement de voix pour interpréter un autre personnage au style opposé du précédent. Bon, de temps en temps, fallait faire des coupes pour être quand même complètement raccord, mais nous étions bien dirigés. :))
J’ai gardé un 33 T vinyle de Télétactica d’ailleurs ! (euh, si j'en retrouve un autre, il est pour vous !)

P.J. : Etes-vous un téléspectateur assidu ? Y a-t-il un personnage, un film ou une série (peut-être plusieurs ?) où vous vous êtes dit : "ce personnage, j'aurais adoré le faire ou le doubler !"

M.E. : Non, je ne suis pas trop assidu... La télé, pour ce qu’elle propose aujourd’hui, ne m’intéresse pas fondamentalement ... Je garde la télé en fond sonore à coté de l’ordinateur bien souvent et n’en retiens que quelques images ou alors des clips, des attitudes... Bon, il peut parfois m’arriver de zapper tout un week-end, mais c'est plutôt rare ! Pour celui que j’aurais adoré doubler, je dirais Jim Carey, mais Emannuel Curtil le fait remarquablement bien ... :°) ! D’une façon générale, les personnages avec un fort accent... J’aime beaucoup ça !

P.J. : De quel comédien ou comédienne vous sentez-vous le plus proche ? Y en a-t-il que vous admirez particulièrement ?

M.E. : Hé bien justement, Jim Carey, qui est capable d’aller très loin dans ses dédoublements de personnalité. Il a une très forte mobilité physique mais aussi vocale.

P.J. : De quelle prestation êtes vous le plus fier dans votre carrière (qu'elle soit dans le doublage ou en théâtre, mise en scène...)

M.E. : Je citerais ce dont nous parlions plus haut : le spectacle pour sourds, dont la mise en scène restera un moment fort de ma vie et mon parcours. Sinon, je garde une grande satisfaction de mon travail sur le film Kirikou et la Sorcière de Michel OCELOT, qui a été fantastique à travailler, dans les émotions, le passage du délire à la sensibilité... Les réactions émerveillées de ces jeunes enfants durant la projection du film en salles sont la plus belle des récompenses.

P.J. : Quelle est votre actualité artistique ?

M.E. : J’ai participé à des expositions sur des photographes renommés, dans lesquelles je jouais le rôle de maître de cérémonie : présentation, lecture de textes... on rencontre beaucoup de gens intéressants de tous domaines artistiques. J’ai en projet une comédie musicale aussi, dont je ne peux pas trop parler encore. Sinon, je continue joyeusement à prêter ma voix à nombres spots de pub radios et télés, certains biens créatifs, d'autres moins ... et puis un genre que j'affectionne particulièrement, c'est le documentaire

P.J. : .....Et un immense merci pour m'avoir accordé un peu de votre temps pour répondre à cette interview.

M.E. : y'a pas d'mal !
enfin j'veux dire ... ça m'a fait plaisir, grâce à vous, de me replonger dans tout çaaaaa ...
et puis, c'était plutôt sympa, non ?
Merci à vous, :))




Auteur : Kahlone
Date interview : 26 novembre 2004